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J'ai toujours eu du mal à refermer ma porte,
Cherché depuis ce jour ce bon samaritain,
Celui qui prit ma main un jour dans la cohorte...
Que ce temps est bien loin, j'étais sous sale escorte,
Mon train m'avait laissé sur les quais, un matin :
C¦ur banni par les miens et devenu cloporte
Aimé par un drogué, vieux souteneur hautain...
J'ai toujours eu du mal à refermer ma porte.
Beaucoup m'auraient jeté, mais il a, puritain,
Cherché à m'enlever de ce port incertain,
Et m'a donné son toit et sa douceur accorte...
Je me souviens encor de sa voix qui m'exhorte,
Ne donnant que bons mots pour un travail certain.
L'ai-je trop négligé cet étranger Latin ?
Point n'est là la raison, mais cette âme si forte
Trouve en moi la couleur d'un immense butin.
Robert Bonnefoy